« Je suis réveillé par la clarté de l’aube. J’ai dormi d’une traite, d’un sommeil sans rêves. Je respire à fond et je me concentre sur ce que je sens en moi. Mais aujourd’hui encore, pas de mot.
La révélation se passe toujours de la même façon. Un matin, tu te réveilles et le mot est devenu une évidence. Il résonne dans ta tête, dans ton cœur. Il a pris possession de la moindre cellule de ton corps. Il fait désormais partie de toi, il est gravé en toi. Pour toujours.
Que ce soit un mot beau ou laid, fort ou ridicule, grand ou petit, te voilà obligé de vivre avec. Pas le choix. »

 

De quoi s’agit-il ?

Le mot d’Abel est un roman pour adolescents de Véronique Petit paru il y a quelques mois aux éditions Rageot. Il est centré sur l’attente de « son mot » par Abel Blanc, un jeune garçon de « treize ans, deux mois et trois jours » qui vit entouré de femmes : ses deux sœurs, Evy et Lou, et sa tante Angie qui les élève depuis la mort de leurs parents dans un tragique accident d’avion. Dans le monde décrit par Véronique Petit, chacun reçoit la révélation d’un mot qui va conditionner toute sa vie. Certains héritent d’un mot noir (prison, meurtre…) et vont devoir mettre tout en oeuvre pour ne pas laisser les mots décider de leur avenir (et notamment, devenir des criminels…). D’autres ont la chance d’obtenir un mot grand et/ou fort (courage, respect, paix…). Ceux qui ont des mots petits, laids (tabouret, pâté, ver de terre…), ont du mal à rêver à de grands destins. Il y a aussi les mots à double sens, comme « voler » : cela peut référence au fait de s’emparer de quelque chose qui n’est pas à soi, comme à celui d’évoluer dans les airs… Surtout, la règle tacite, qui fonde la société, c’est de ne jamais révéler son mot à personne. « Révéler son mot, c’est exposer la partie la plus profonde de soi, la plus personnelle » dit Tante Angie à Abel. On ne plaisante pas non plus avec ceux qui dévoilent le mot d’autrui : même si la fuite a lieu au sein de l’école, une enquête de police est diligentée.

 

A qui s’adresse-t-il ?

Il peut être lu à partir de 12 ans environ.

 

Pourquoi faut-il l’avoir dans sa bibliothèque ?

L’idée de départ est originale : chaque être humain aurait un mot qui lui serait révélé (à lui-même) à la pré-adolescence, lorsqu’il serait prêt. Charge à lui ensuite d’en faire bon usage.

En effet, l’idée qui irrigue la société dans laquelle vie Abel, c’est que le mot conditionne complètement la vie de chacun. Des exemples circulent ainsi : Louis Pasteur, qui a découvert le vaccin contre la rage, avait hérité de « minuscule » quand le docteur Petiot, le tueur en série le plus connu en France pendant la Seconde Guerre Mondiale, avait reçu « célèbre ».

Pourtant, certains s’élèvent contre l’importance des mots, pensant que « l’homme est plus grand que son mot » et donc capable de s’élever contre lui. Ce qui occasionne une réflexion intéressante sur le rôle de l’homme et sa marge de manoeuvre (ce qui m’a rappelé l’existentialisme de Sartre !).

Un roman très intéressant et agréable à lire !